“Victoire de la droite nationaliste“, “défaite des partis écologistes“, sont les titres de la presse suisse et étrangères au sortir de ce dimanche de votations fédérales du 22 octobre 2023. Or, quand on regarde l’évolution de la force des partis politiques au Conseil national (chambre basse) depuis un siècle, difficile d’être frappé par autre chose que la très grande stabilité des équilibres politiques. Pas d’alternance gauche-droite, et si l’on a quelque fois parlé de “raz-de-marée” ces dernières années, c’est pour commenter des mouvements de 4-5%, ou des dynamiques à moyen ou long terme, comme la forte progression de l’UDC dans les années 1990-2000.
Comme il se trouve que l’évolution de la force des partis politiques est l’exemple de base que j’utilise dans mon cours de visualisation de statistiques historiques à l’EPFL, autant mettre à jour et partager ce petit diagramme pour celles et ceux qui s’intéressent à l’évolution sur le long terme.
Survolez les barres et les cercles pour afficher les partis et valeurs
Si le tableau ci-dessus permet efficacement de constater la très faible évolution de l’équilibre gauche (rouge) / droite (bleu), on peut également l’utiliser pour documenter la “vague verte” de 2019 et son reflux actuel, comme ci-dessous :
À noter que la catégorisation des partis est un peu approximative parce que leur positionnement a évolué depuis le passage au système proportionnel (1919). Comme certains partis ont fusionné/se sont scindés et que l’Office fédéral de la statistique a produit ces jeux de données en prenant la situation récente comme point de départ, ces visualisation “écrasent” une partie de la complexité des rapports de forces de la première moitié du XXe siècle.
Magnifiques représentations, énorme Bravo.
Deux remarques :
– Sur quoi vous êtes-vous basés pour définir que le MCR est plus à droite que l’UDC ? Ce sont des évaluations un peu ambigües.
– Dans le second schéma, de nombreux partis n’étaient pas représentés au conseil fédéral, mais sont en gris clair. Par exemple, le PS n’a été représenté au conseil fédéral qu’en 1944, contrairement à ce que le graphique montre. A l’inverse, le PBD était représenté au conseil fédéral de 2008 à 2015 (et actuellement au sein du Centre).
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En ce qui concerne le positionnement des partis, c’est une classification qui est nécessairement ambigüe puisque les partis eux-mêmes forgent leurs propres référentiels pour se positionner sur des axes qui ne se limitent pas au traditionnel gauche-droite. Les médias en usent d’autres, ainsi que les politologues. Ici, le MCR hérite de l’orientation “blochérienne” du MCG à l’époque du schisme. S’il s’agit toujours d’un parti populiste, on peut peut-être en effet le reclasser dans “droite conservatrice” si on fait abstraction de la politique genevoise pour se concentrer sur les votes de ses représentants à Berne.
Et en ce qui concerne la classification du deuxième graphique, c’est exactement ce que je mentionne rapidement en-dessous, c’est-à-dire qu’il s’agit d’un classement “actuel” qui perd son sens dans le temps long. D’ailleurs, le terme de “vert” lui-même – qui est au centre de cette visualisation – est sujet à caution parce que pendant des décennies c’est le PS qui était le parti à sensibilité écologiste. Il l’est toujours, comme le montrent ses votes au parlement, mais les médias l’incluent rarement quand ils thématisent la “vague verte”.