Qu’est-ce que les humanités numériques ? A la croisée des champs disciplinaires, s’agit-il d’une discipline propre, d’un espace interdisciplinaire, de nouvelles pratiques, d’une palette d’outils techniques au service des humanités ou au contraire d’une immersion des problématiques SHS dans le milieu des sciences dures ?
Le Read/Write Book 2 tente de répondre à ces questionnements sous la forme d’un recueil de 17 contributions. Sans parler de la qualité et de l’intérêt de son contenu, cette publication a deux particularités remarquables : Premièrement, les articles qui le composent ne sont pas des exercices académiques mais des textes déjà publiés, souvent sous la forme de billets de blog, qui constituent un excellent aperçu de l’état actuel (2012) des réflexions puisque ce mode de publication est beaucoup plus rapide qu’une revue traditionnelle. Deuxièmement, le recueil est disponible en intégralité et gratuitement sur internet, chapitre par chapitre (on peut en commander une version imprimée, pour les réac’ comme moi qui s’attachent pour quelques temps encore au papier).
Compte-rendu
Dans le but de pouvoir offrir au lecteur un aperçu global et original de la richesse du contenu de cet ouvrage collectif, ce compte-rendu consiste en une courte citation de chaque article, choisie dans une subjectivité assumée (retrouvez les articles complets grâce aux liens après les citations):
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Faire des humanités numériques
Aurélien Berra
Nous ne vivons pas un âge d’or ni une révolution computationnelle déjà réalisée, mais plutôt une évolution : une coalescence des pratiques et des techniques. […] Il ne s’agit pas d’être à la mode, mais bien plutôt conscient de toute l’histoire d’un champ.
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Du litterary and linguistic computing aux digital humanities : retour sur 40 ans de relations entre sciences humaines et informatique
Lou Burnard
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Ce que les informaticiens trouvaient très difficile à comprendre, c’est le fait que les données elles-mêmes constituent une espèce de texte : elles ne sont pas objectives.
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Les digital humanities aujourd’hui : centres, réseaux, pratiques et enjeux
Corinne Welger-Barboza
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Le fait d’appartenir à, ou de générer des réseaux n’est pas suffisant. Il faut également posséder la capacité, je dirais même plus la culture du fonctionnement en réseau. Pour ce faire, des outils ont été mis en place, très vite et très tôt.
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Qu’apportent les digital humanities ?
Hubert Guillaud
Nous sommes essentiellement préoccupés par la structuration d’une discipline, alors que nous souhaiterions surtout comprendre ce que ces outils apportent concrètement.
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Qu’apportent les digital humanities ? Quelques exemples
Pierre Mounier
On peut se demander si, en s’adaptant au nouveau contexte, à la fois du point de vue des méthodes utilisées, mais aussi de la temporalité de publication et enfin des formes d’exposition, ces disciplines ne changent pas profondément d’objectif et de nature.
[original 1/2 – 2/2 / publié]
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Les-humanitiés-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom
Neel Smith
La locution “humanités numériques” se réfère plutôt au savoir, dans les sciences humaines, qui, délibérément, tient compte du fait que nous travaillons tous avec le numérique aujourd’hui.
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Un regard jeté sous le chapiteau : les humanités numériques et la crise de l’inclusion
Melissa Terras
Malgré les définitions changeantes et les variations de perspectives sur notre domaine, la valeur et l’utilité de nos compétences sont démontrées par ce que nous faisons.
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Mettre en pratique ce que l’on prêche. La recherche en sciences humaines et sa praxis critique
Janneke Adema
Je veux montrer qu’en ce moment même […], développer une forme de littéracie numérique peut être vu comme un processus qui va de pair avec le développement d’une littéracie critique.
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Citer les humanités numériques : l’Old Bailey est-il un film ou un article scientifique ?
Adam Crymble
Cela [la créditation d’un auteur] est particulièrement important pour les personnes qui suivent une carrière académique alternative (alt-ac), dont la carrière et, dans de nombreux cas, le prochain repas dépendent de l’importance de leur portefeuille de réalisations.
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Pénurie ou abondance ? Préserver le passé à l’ère du numérique
Roy Rosenzweig
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Nous sommes en mesure d’enregistrer tous les produits de notre culture et d’y effectuer des recherches rapides. Mais cette abondance débouchera-t-elle sur une histoire plus raisonnée ou de meilleure qualité ?
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La digital history : histoire et mémoire à la portée de tous
Serge Noiret
Les jeunes historiens, avec le numérique, orchestrent l’écriture même de l’histoire en dominant les relations sémantiques fournies par les liens hypertextuels internes et externes au projet. Toutefois, cette nouvelle historiographie a des difficultés à s’intégrer dans le travail traditionnel des historiens.
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Archiver le web
Nicolas Thély
Alors que tous les esprits se concentrent sur l’archivage sous l’angle de la gestion des savoirs, Archive.org produit un effet dissonant car la Wayback Machine offre une expérience imparfaite.
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Quand Google Books permet de comprendre notre génome culturel
Xavier de la Porte
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En deux cents ans, 16% des verbes irréguliers sont devenus réguliers. Et ce sont les verbes les plus couramment utilisés qui résistent le plus au changement.
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Six provocations à propos des big data
Danah Boyd et Kate Crawford
Cela révèle l’existence d’un courant arrogant dans nombre de débats sur les big data, dans lesquels toutes autres formes d’analyses peuvent être écartées au profit d’une production à la chaîne de chiffres.
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Prodiges et vertiges de la lexicometrie
Francis Chateauraynaud et Josquin Debaz
L‘idée que les mots puissent indiquer une tendance macrosociétale sans que les contextes et configurations socio-historiques soient accessibles suppose que l’utilisateur soit capable de contextualiser et d’opérer les bons rapprochements.
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L’interprétation des graphiques produits par Ngram Viewer
Patrick Peccatte
Ngram Viewer doit en fait être considéré comme un outil heuristique qui permet davantage de poser de nouvelles questions que d’apporter des réponses.
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Comment les usages numériques transforment-ils les sciences sociales ?
Antonio Casilli
Au-delà des dangers réels pour la confidentialité des répondants, on se retrouve parfois confrontés à des personnes formées dans un autre contexte, et qui ne comprennent pas exactement ce qu’implique la collecte de données à l’aide d’un site web.
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Ressources
Les auteurs nous proposent une liste de publications et posts de blog “pour aller plus loin”. Dans la mesure où ces références complètent admirablement les définitions ci-dessus, en voici une sélection:
DH Liste de discussion francophone | Gold, Matthew K. (ed.) Debates in the Digital Humanities | Alvarado, Rafael The Digital Humanities Situation | Caverni, Jean-Paul, et Dacos, Marin Construire les digital humanities en France. Des cyber-infrastructures pour les sciences humaines et sociales | Schreibman, Susan, Siemens, Ray, et Unsworth, John A Companion to Digital Humanities | Rockwell, Geoffrey Responding to Surfdom | Burnard, Lou Quel avenir pour l’édition génétique sans digital forensics ? | Chateauraynaud, Francis Les humanités numériques sont-elles solubles dans Google ? | Manovich, Lev Trending: The Promises and the Challenges of Big Social Data | Michel, Jean-Baptiste (et al.) Quantitative Analysis of Culture Using Millions of Digitized Books | Carnets Hypothèses : Computer drawing, Digital humanities à l’IHA, Epigraphie en réseaux, Opinion mining et sentiment analysis, Philologie à venir, THATCamp, We think History, Zotero francophone.
Commentaire
J’espère de tout coeur que vous aurez autant de plaisir que moi à découvrir ces articles qui sont comme autant d’éclairages très personnels sur ce phénomène humanités numériques ! Pour ma part, je trouve très riche l’exercice intellectuel de reconstitution de cette mosaïque au travers de courtes citations qui se complètent et se répondent, pour tenter de conserver la lisibilité de l’ensemble.
Et comme le champ est vaste et s’offre à la collaboration de tout un chacun, je serais très heureux de lire vos commentaires sur la forme et le fonds de ce compte-rendu, ainsi que vos suggestions de lectures, liens intéressants, listes Twitter de digital humanists/veille, etc… !
Voilà une manière élégante et efficace de rendre compte d’une expérience de lecture : merci !
Je crois (avec une ferveur peut-être naïve) en le pouvoir du partage bienveillant des connaissances. Le Read&Write Book 2 en est un exemple, et sa lecture m’a beaucoup profité. Le faire passer plus loin en attisant la curiosité d’éventuels lecteurs est une façon de lui (de vous, ses auteurs) faire continuer son chemin de connaissance vivante, partagée et discutée ! 🙂
Merci beaucoup Martin. La forme de ton compte-rendu est effectivement parfaite, et donne envie.
Et je te rejoins dans le team “réac papier encore pour un moment”…