Le datajournaliste n’est ni un infographiste, ni un statisticien, ni ce magicien capable de tirer sa rédaction de tous les mauvais pas (en particulier lorsqu’un annonceur s’est désisté et qu’il reste une pleine page vide dans l’édition du lendemain) !
Tirant le bilan des expériences passées au sein du RechercheDesk de la SonntagsZeitung et du Matin Dimanche, Julian Schmidli nous a livré le 17 septembre dernier 5 “leçons de datajournalisme tirées de la pratique” dans le cadre de la journée DatenJournalismus (InfoCube Orell Füssli, à Zürich).
“Peut-on l’imprimer ?”
C’est par ce titre un peu laconique que débute la présentation de Julian Schmidli, en écho à l’éternel souci des rédacteurs en chef de médias papier de rendre les projets fous de leurs datajournalistes préférés compatibles avec leur mode de production traditionnel.
Avec son accord, je donne à ce compte-rendu une forme qui tente d’en synthétiser les éléments-clés:
1. Connaître son rôle
Le datajournaliste n’est ni un infographiste, ni un développeur, ni un statisticien, ni un gestionnaire IT, encore moins ce magicien capable de tout (et de rien). Il a une mission : faire de l’actualité avec des données, qui nécessitent un grand travail de traitement et d’analyse.
2. Penser au résultat
En particulier s’il produit une enquête à destination d’un média papier, celle-ci doit être dès le début orientée vers une réalisation compatible au support final.
3. Se laisser guider par les données
Les données elles-mêmes sont porteuses d’un sens qu’il s’agit de révéler. Dans ce cas, la visualisation n’est plus un produit final mais un outil pour faire émerger ce sens.
4. Ne pas oublier les personnes derrière les données
Les données sont produites par des individus ou parlent d’individus. Un contenu journalistique trop focalisé sur les données elles-mêmes en évacue le sens implicite.
5. Être conscient de ses limites
Analyser les millions de données non structurées de Wikileaks n’est pas à la portée de n’importe quelle rédaction. Travail d’investigation de longue haleine, le datajournalisme nécessite également parfois de faire une croix sur certains projets.
Retrouvez Julian Schmidli sur Twitter et sur son site internet. Ci-dessous, le contenu de sa conférence (en allemand) :
Le visuel accompagnant cet article (au merveilleux titre incitatif…) reflète assez précisément ce qui me dérange parfois avec la restitution des données: on dirait un sapin de Noël décoré avec du M Budget. Entre effets visuels, dégradés de couleurs, textes mis en exergue ou en gras, je m’y perds un peu. Comme quoi, un bon datajournaliste c’est peut-être aussi un bon infographiste. Ou bien ?
Merci pour ce commentaire ! Il illustre bien la confusion qui peut exister entre la visualisation de données et la simple infographie. Ici, le visuel ne présente aucunes données, c’est un simple texte augmenté d’artifices (qu’on peut apprécier ou pas) qui aident (certains) à synthétiser une thèse. Il ne s’agit donc pas d’un travail de datajournalisme…
Je ne vois toujours pas la différence avec un infographiste…
La différence dans la forme est ténue et pâtit du fait que infographics est un faux-ami en anglais, mais l'”infographie” est le produit d’un graphiste qui met en valeur une information, texte, sujet,… alors que la “visualisation de données” est une image (souvent retravaillée par un graphiste, mais pas forcément) qui exprime visuellement des chiffres, statistiques, etc…
L’image de ce post est une “infographie” alors que le travail du datajournaliste est de produire des “visualisations de données”… 😉
Guts. Je crois bien que j’ai compris. Malgré mon cerveau reptilien qui date du XXe siècle. Merci !